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Dans mon chapeau...

Dans mon chapeau...
17 mai 2009

Orageux

18643215"Les climats" de Nuri Bilge Ceylan,
avec Ebru Ceylan, Nazan Kesai et Nuri Bilge Ceylan

Soleil et pluie. Orage et neige. Nuri Bilge Ceylan joue de toutes les ressources de la métaphore météorologique pour nous dépeindre les états d'âmes de ses héros, Bahar et Isa. Il nous offre ainsi le portrait impressionniste d'un couple en déliquescence, incapable de se rejoindre comme de vraiment se séparer. Il y a là un triste constat d'incommunicabilité qui n'a rien à envier à l'ultime tentative du poète Ka pour retrouver l'amour dans le très beau roman d'Orhan Pamuk, "Neige", et pas seulement parce que Nuri Bilge Ceylan nous entraîne dans un périple par les paysages solitaires et désolés de son pays.

C'est une très belle découverte que ce film lent, contemplatif et pourtant tendu, où les personnages se parlent peu mais où les images parlent pour eux, comme elles le feraient dans certains des chefs-d'oeuvre de Michelangelo Antonioni, "L'Eclisse" ou "L'Avventura", dans le jeu des cadrages souvent audacieux et étonnament inventifs. Ça devrait aller de soi: le cinéma est un art de l'image, mais ces films où les images sont si éloquentes sont si rares...

J'ai vraiment savouré ces "climats", enregistré la semaine dernière sur Arte (à une heure indue, troisième sinon quatrième partie de soirée, comme de bien entendu). Et je vais me dépêcher d'aller voir le dernier film de Nuri Bilge Ceylan, "Three monkeys", tant qu'il passe encore en salle. 

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16 mai 2009

Un inventaire des vieilles forges de Wallonie

"Forges anciennes" de René Evrardforgesanciennes1956evrard
2 ½ étoiles

Solédi, 1956, 225 pages, sans isbn

Quelques mots pourraient suffire à résumer cet ouvrage de René Evrard : c’est tout simplement un inventaire, dressé entre 1949 et 1955, et accompagné d’une riche documentation photographique, des vieilles forges wallonnes installées sur les rives des affluents ou sous-affluents de la Meuse, de la Sambre ou de la Moselle - des cours d’eau dont le courant fournissait l’énergie nécessaire à l’entraînement des soufflets assurant la ventilation des fourneaux ou encore des lourds makas (puisque tel est le nom que l’on donne en Wallonie à ces lourds marteaux hydrauliques que l’on connaît plus souvent en France sous celui de martinets).

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"Forges anciennes" aurait normalement dû constituer le deuxième volet – publié avant le premier - d’un diptyque consacré à l’histoire de la métallurgie du fer en Wallonie, mais pour une raison que j’ignore, il semble que le premier volume n’ait en fait jamais vu le jour [1], nous privant donc d’une information contextuelle et historique qui est ici réduite au strict minimum: un bref résumé des données disponibles - dans la littérature disponible alors – au sujet de chacune des usines à fer répertoriées ici. Plusieurs études plus approfondies – et exploitant largement les registres des permissions et maintenues d’usines, ou encore de vieilles archives familiales… - ont été publiées depuis lors (citons par exemple les travaux de Georges Hansotte, ou le mémoire d’Alphonse Gillard traitant du travail du fer dans l’Entre-Sambre-et-Meuse). Et il en découle que le texte du livre de René Evrard ne présente plus pour les lecteurs d’aujourd’hui qu’un intérêt limité.

Les photographies réalisées par Clément Dessart pour le présent volume, en revanche, constituent toujours des documents très précieux pour qui s’intéresse à l’histoire du travail du fer dans la région. Dans les années 1949-1955, quelques rares forges étaient en effet toujours en activité, fabriquant encore au maka des outils agricoles pour les fermes avoisinantes, et Clément Dessart a ainsi eu l’occasion de photographier quelques makas et cisailles hydrauliques qui ont entretemps été démantelés [2].

Mais dans d’autres cas, beaucoup plus nombreux, il ne subsistait plus des anciennes forges que leurs installations hydrauliques réaffectées au fonctionnement d’une scierie ou d’un moulin à farine, ou encore des bâtiments reconvertis en maisons d’habitation ou en exploitations agricoles.

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Et parfois, les traces se font plus ténues encore : un lieu-dit dont le nom atteste encore de la présence, dans un passé lointain, d’une usine à fer ou un étang artificiel, souvenir d’une retenue d’eau destinée à alimenter les roues d’une fabrique depuis longtemps disparue… Autant de souvenirs d’une vie industrielle aujourd’hui évanouie et dont on ne peut que savoir gré à René Evrard de les avoir préservés pour les générations futures.

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[1] Je n’ai en tout cas pas réussi à en retrouver la trace, y compris dans les collections de la Bibliothèque Royale.

[2] Entre le moment où les photos ont été prises (1949-1955) et la publication de l’ouvrage (en 1956), pas moins de huit des douze makas qui y sont répertoriés ont en effet été démontés ! Et aujourd’hui, en 2009, je ne me risquerais pas à parier un centime sur le fait qu’un seul de ces makas soit encore conservé sur son site d’origine…

14 mai 2009

C'est la pleine floraison... (2)

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Namur, cour de l'arsenal (cliché Fée Carabine)

C'est la pleine floraison (1), (3), (4), (5) et (6)

13 mai 2009

Trésors turinois

"De Van Dijk à Bellotto",
Palais des Beaux-Arts, Bruxelles
Du 20 février au 24 mai 2009

Ducs de Savoie, princes de Piémont et enfin rois d'Italie, les membres de la famille de Savoie ont aussi, chacun à leur façon, été des amateurs d'arts et des collectionneurs avertis. Quelques unes des plus belles pièces qu'ils ont rassemblées entre le XVème et le XVIIIème siècle sont à présent conservées à la Galleria Sabauda de Turin, et ce musée aujourd'hui en cours de restauration a accepté de prêter certaines de ces oeuvres au Palais des Beaux-Arts pendant le temps des travaux, fournissant la matière d'une exposition pour le moins éclectique mais impeccablement présentée et par là-même passionnante.

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Orazio Gentileschi, Annonciation (source)

S'ouvrant par une salle consacrée aux portraits officiels - souvent hiératiques et figés - de quelques uns des membres les plus influents de la famille de Savoie, l'exposition se poursuit en alternant présentations chronologiques et thématiques (une salle étant réservée aux natures mortes et une autre à la peinture de paysage). Il y en a vraiment pour tous les goûts: deux beaux manuscrits enluminés (prêtés par la Bibliothèque royale de Bruxelles, où ils avaient abouti dans l'héritage de Marguerite d'Autriche, la tante de Charles Quint, gouvernante des Pays-Bas et veuve de Philibert de Savoie), une Vierge à l'Enfant de Mantegna (en très mauvais état, ce pourquoi il faut remercier Napoléon 1er et sa bande de pillards), une splendide Annonciation, chef-d'oeuvre d'Orazio Gentileschi, une très belle Vue de Turin où Bernardo Bellotto déploie toute la précision coutumière de son maître Canaletto, et bien sûr un magnifique portrait des enfants royaux d'Angleterre, peints par Van Dijk, un cadeau de la reine Henriette, l'épouse de Charles 1er, à sa soeur Christine de Savoie...

 

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Bernardo Bellotto, Turin vue depuis les jardins royaux (source)

C'est à voir au palais des Beaux-Arts de Bruxelles jusqu'au 24 mai, du mardi au dimanche et de 10h à 18h (nocturne le jeudi jusque 21h). Et la SNCB a la bonne idée de proposer un billet conjoint train+expo à prix réduit, qu'on se le dise ;-).

Présentation de l'exposition sur le site du Palais des Beaux-Arts

12 mai 2009

"Now is the time"

C'est le temps des lilas le temps des hirondelles
Le doux temps du muguet et des robes nouvelles
C'est le temps de courir et de jouer aux billes
C'est le temps de flâner et d'agacer les filles

Le temps d'aller draguer sans chercher la plus belle
Le temps de tout repeindre et de mettre aux poubelles
Les restes d'un hiver qui assiégeait la ville
C'est le temps des T-shirts le temps des espadrilles

C'est le temps des balcons Et l'on va se berçant
Devant la corde à linge où flottent des toilettes
Comme des souvenirs qui reviennent d'antan

C'est le temps de s'étendre pour conter fleurette
En équeutant des pissenlits dans l'herbe verte
C'est le temps C'est le temps C'est le temps C'est le temps

Jean O'Neil, "Montréal by foot", Libre Expression, 2005, p. 29

Un autre poème de Jean O'Neil, dans mon chapeau: "Christmas"

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10 mai 2009

L’Amérique de l’an 2000

"L’état des lieux (Frank Bascombe, III)" de Richard Ford415y5uYuP8L__SL160_AA115_
4 étoiles

Editions de l’Olivier, 2008, 730 pages, isbn 9782879295251

(traduit de l’Anglais par Pierre Guglielmina)

Voici notre troisième rendez-vous avec Frank Bascombe, cette fois à l’occasion des célébrations familiales de Thanksgiving, et avec, comme pour les deux volets précédents *, des élections présidentielles en toile de fond, soit l’élection de l’automne 2000, "volée" par Georges Bush Jr face à Al Gore. Si jamais un quatrième volet des heurs et bonheurs de Frank Bascombe devait voir le jour, on peut sans doute risquer l’hypothèse qu’il prendrait place au moment des fêtes de Noël de l’année 2008, peu après la victoire de Barack Obama et en pleine crise économique ;-).

Mais trève de plaisanterie, depuis les événements racontés dans "Indépendance" et qui se déroulaient à l’été 1988, l’Amérique est devenue plus dure et s’est faite la proie d’une violence sans rime ni raison, une violence dont nous ne cesserons pas de sentir la présence inquiétante tout au long de cet "état des lieux", toujours hanté, comme les volumes précédents, par l’inacceptable absence de Ralph, le fils aîné de Frank mort à l’âge de neuf ans, bien avant que nous ne fassions la connaissance de son père. Georges Bush n’est pas encore au pouvoir, les attentats du 11 septembre n’ont pas encore eu lieu et les guerres d’Afghanistan et d’Irak n’ont pas commencé, mais vraiment, il y a quelque chose de pourri au pays du grand rêve américain, même si celui-ci continue à faire des adeptes tels Mike Mahoney, l’assistant de Frank, immigré d’origine tibétaine qui mêle allègrement en une épaisse soupe new age sa culture bouddhiste à la doctrine libérale de son pays d’adoption. Richard Ford nous propose ainsi un état de l’Amérique d’autant plus fascinant qu’il s’inscrit dans la perspective des deux premiers tomes et d’une évolution s’étalant sur plus de quinze ans.

Et vivant dans ce monde plus dur, Frank a vieilli et s’est fait plus vulnérable que jamais.  Désormais installé à Sea Clift dans une maison du bord de mer menacée à terme par l’érosion des côtes, atteint d’un cancer de la prostate et délaissé par sa seconde épouse, Sally qui est partie rejoindre en Ecosse, dans une obscure tentative de renouer les fils d’une histoire jamais clôturée, son premier mari brutalement réapparu après avoir été présumé mort pendant près de vingt ans, Frank n’a sans doute jamais été si sensible à la fragilité et à la finitude de nos petites vies humaines. Cela nous vaut de longues pages de ces réflexions introspectives qui sont devenues les marques de fabrique du personnage: des pages vraiment trop longues mais aussi, bien souvent, touchantes par le mélange de fragilité et de joie de vivre qui s’y exprime, apportant une belle conclusion (provisoire ?) au cycle de Frank Bascombe.

Extrait:

"Entre-temps de nouvelles vagues humaines déferlaient accomplissant le trajet quotidien pour travailler à Haddam plutôt qu’à Gotham ou à Philly. Une petite population de sans-abri était apparue. Il fallait attendre en moyennne treize mois pour obtenir un rendez-vous chez le dentiste. Et les habitants que je rencontrais dans la rue, des citoyens que je connaissais depuis vingt ans et à qui j’avais vendu des maisons, refusaient à présent de croiser mon regard, fixaient leurs yeux sur mes cheveux et continuaient d’avancer, comme si nous étions tous devenus les vieillards à la fois excentriques et invisibles que nous avions rencontrés nous-mêmes à notre arrivée des décennies plus tôt.

Haddam, dans ces détails diaboliques, avait cessé d’être une banlieue tranquille et heureuse, cessé d’être dans une position subalterne pour devenir une ville à elle seule, sans avoir cependant une substance bien déterminée. Elle était devenue une ville d’autres, pour d’autres. On pouvait dire qu’elle manquait d’âme, ce qui expliquerait pourquoi le besoin d’un Centre d’information se fait sentir et pourquoi célébrer le passé du village semble être une bonne idée. Le présent est ici, mais on ne peut pas sentir son poids dans le creux de la main." (p. 138)

* "Un week-end dans le Michigan (Frank Bascombe, I)" et "Indépendance (Frank Bascombe, II)", tous deux déjà présentés dans mon chapeau.

Richard Ford était l'auteur des mois de février et mars 2009 sur Lecture/Ecriture.

9 mai 2009

Les "ancêtres" de Tintin

Affiche_Tintin"Les voitures de Tintin"

Ce week end, Namur attend de pied ferme les hordes de tintino-philes, -lâtres et autres tintinologues à l'occasion d'un festival Tintin proposant de nombreuses animations pour tous les âges et tous les goûts (voir le programme: ici)

Ainsi, quelques unes des voitures - autant d'anciens modèles, ce qui n'a que plus de charme - que Tintin a utilisées au cours de ses aventures sont rassemblées sous tente, sur la place d'Armes (qui accueille par ailleurs toujours l'exposition des photos de "Namur vue du ciel"). Ces "ancêtres" s'y taillent un joli succès, en nous offrant un agréable moment en famille.

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La Lancia Aprilia de l'émir Mohammed Ben Kalish Ezab, utilisée par Tintin et le capitaine Haddock dans "L'or noir" (Cliché Fée Carabine)

Ces deux expositions, "Namur vue du ciel" et "Les voitures de Tintin", sont encore visibles sur la place d'Armes pendant la journée de demain, dimanche 10 mai.

8 mai 2009

Perrault revisité

19051515"La véritable histoire du chat botté"
de Jérôme Deschamps, Pascal Hérold et Macha Makeieff

Tout le monde connait cette histoire, grand classique au vert paradis des lectures enfantines: un pauvre meunier, sur le point de mourir, a légué son moulin à ses deux fils aînés, laissant au benjamin, P'tit Pierre, un chat aussi bavard qu'il n'est botté et par surcroît bien décidé à lui faire épouser la fille du roi.

Et en gros, c'est bien cette histoire-là que Jérôme Deschamps, Pascal Hérold et Macha Makeieff ont entrepris de nous raconter ici. A ceci près qu'ils l'ont bourrée à craquer de gags en cascade et de parodies en tout genre, jusque dans la bande-son d'une impertinence réjouissante, qui passe indifféremment à la moulinette des mirlitons la "Carmen" de Bizet ou la "Chevauchée des Walkyries" (à laquelle elle donne une illustration presqu'aussi drôle que celle de Fellini dans "Huit et demi"), proposant ainsi une relecture joliment irrévérencieuse du conte de Perrault (quoique pas aussi iconoclaste que celle qu'en donne Vera Feyder dans ses "Règlements de contes").

On a bien par moment l'impression de "saturer", et de ne pas suivre à décrypter toutes les allusions plus ou moins subtiles ou à identifier les ressemblances des personnages avec des êtres bien réels: la reine, bien sûr, qui emprunte les traits de Yolande Moreau qui lui prête aussi sa voix (en bon "Belge" dans le texte), et l'un des frères de P'tit Pierre qui rappelle sans hésitation Jamel Debbouze et son rôle de commis d'épicerie dans "Le fabuleux destin d'Amélie Poulain". Mais vraiment il y en a trop, de ces allusions... Trop pour en parler ici, et même trop pour les repérer toutes après une seule vision du film.

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(source)

Bref, c'est à mourir de rire, à voir et peut-être bien à revoir, un peu comme les meilleurs albums d'Astérix si vous voyez ce que je veux dire...

6 mai 2009

Une biographe mène l’enquête

"La Princesse des glaces" de Camilla Läckberg41Zqh0Ctc5L__SL160_AA115_
4 étoiles

Actes Sud/actes noirs, 2008, 382 pages, isbn 9782742775477

(traduit du Suédois par Lena Grumbach et Marc de Gouvenain)

Auteur de plusieurs biographies consacrées à quelques unes de ses célèbres consoeurs suédoises, Erica Falck est revenue s’installer pour un temps – suite au décès de ses parents - dans sa ville natale de Fjällbacka, sur la côte ouest de la Suède. Et par une coïncidence improbable et surtout douloureuse, elle a été amenée à découvrir, dans une villa proche de la maison familale, le corps d’une de ses amies d’enfance, Alexandra Wijkner, les poignets tailladés dans une mascarade de suicide…

Les liens entre les deux fillettes s’étaient distendus, inexplicablement, à l’orée de l’adolescence, quelques mois avant que la famille d’Alexandra ne déménage à Göteborg, laissant à Erica un sentiment d’incompréhension mêlé de regrets. Aussi ne pouvait-elle qu’accepter la demande des parents d’Alex et écrire la nécrologie de son amie, dans une dernière tentative pour comprendre ce qui avait, selon toutes apparences, fait déraper la vie d’Alex vingt-cinq ans plus tôt avant de provoquer sa mort, et ce qui avait alors mis fin à leur amitié. Sans oublier que cela lui donnerait de bonnes raisons de croiser le chemin de Patrik Hedström, un des policiers chargés de l’affaire, qui fut son soupirant aussi transi que malchanceux au temps du lycée mais qu’elle trouve à présent fort à son goût. Selon la jolie expression en vigueur outre Manche: une romance fleurit, apportant un peu de douceur dans le monde de brutes de l’enquête policière.

Et petit à petit, c’est l’idée d’un nouveau livre – un livre sans doute pas très différent de celui que Camilla Läckberg propose à ses lecteurs - qui s’impose à Erica, cédant à son habitude professionnelle de fouiller les vies de ses semblables : "Au début, pensant qu’[Alex] s’était suicidée, elle avait eu en tête d’écrire un livre qui répondrait à la question "pourquoi?" et qui pencherait du côté documentaire. Maintenant, le matériel prenait de plus en plus la forme d’un polar, genre qui ne l’avait jamais particulièrement attirée. C’était les gens, les relations entre eux et leurs fonds psychologiques qui l’intéressaient, et à son goût, la plupart des polars laissaient cela de côté pour privilégier les meurtres sanglants et les frissons dans le dos. Elle détestait tout ce qui était clichés et sentait qu’elle voulait écrire quelque chose d’authentique. Quelque chose qui essaierait de décrire pourquoi une personne pouvait commettre le pire des péchés – retirer la vie d’une autre personne." (pp. 110-111)

C’est peut-être cette volonté de comprendre, et de chercher les motivations intimes derrière les explications de façade, qui fait de "La Princesse des glaces" un roman captivant. Alors même que l’écriture ne donne pas l’impression d’être particulièrement soignée - le style reste tout du long très proche d’un langage parlé, ce qui a d’habitude plutôt pour effet de m’horripiler surtout lorsque ce procédé est maintenu sur une longue distance -, je n’ai pas pu lâcher ce livre avant d’en avoir tourné la dernière page. Captivant, je vous assure…

Un autre livre de Camilla Läckberg, dans mon chapeau: "Le Prédicateur"

5 mai 2009

Tour à tour mendiant ou roi seul en sa demeure...

"Raoul" de James Thierrée

Théâtre Royal de Namur, le 2 mai 2009

C'était le dernier spectacle à mon programme pour la saison théâtrale 2008-2009, et il s'est imposé comme un des spectacles les plus beaux, les plus étonnants et les plus profondément émouvants que j'ai jamais eu l'occasion de voir - et pas uniquement pendant cette seule saison -, quelque part dans un septième ciel du théâtre aux côtés d'une mémorable "Nuit des rois" à l'Atelier Théâtre Jean Vilar de Louvain-la-Neuve (heu... il y a bien quinze ans de ça...), d'un bouleversant "Jeu de l'amour et du hasard" (production du Théâtre des Amandiers de Nanterre, qu'une tournée avait emmenée à Namur) ou d'un superbe "Cercle de craie caucasien" (Version Benno Besson). Un très très beau moment de théâtre, donc, même si la ressemblance avec les spectacles que je viens de citer s'arrête sans doute à cela.

Parce que pour commencer, "Raoul", ce n'est pas vraiment du théâtre. Pas d'histoire. Pas de texte. Mais un personnage: Raoul, tour à tour mendiant ou roi seul en son château (une improbable cabane de tubes métalliques qui va se déglinguant au cours du spectacle), pourfendeur de dragon ou petit garçon terrorisé et tremblant. James Thierrée est - presque - seul en scène, tout à la fois acteur, acrobate, musicien, danseur ou encore mime. Tombé dans la marmite des arts du spectacle quand il était petit, dans la troupe de ses parents - Jean-Baptiste Thierrée et Victoria Chaplin -, James Thierrée sait absolument tout faire. Et ce qui est mieux, il nous offre une heure et demie de poésie à l'état pur - à nous laisser bouche-bée-émerveillés comme seuls des enfants peuvent l'être.

A nous laisser aussi miraculeusement émus, troublés et incertains, que devant les plus belles scènes des films de Charlie Chaplin, l'encombrant et génial grand-père dont, paraît-il, James Thierrée n'aime pas qu'on lui parle en interview, mais avec lequel il offre par moments - un geste ici ou là, et la petite mèche folle qui lui tombe sur le front - une ressemblance sidérante. Un grand-père dont il a en tout cas hérité l'invraisemblable talent pour animer le mouvement le plus simple d'une émotion à couper le souffle et donner la chair de poule. Mais pas pour refaire du Charlie Chaplin. Non. Pour nous offrir du James Thierrée: un monde unique que vous n'auriez jamais osé imaginer même dans vos rêves les plus fous...

Créé la semaine dernière à Namur, "Raoul" poursuivra ensuite sa route dans le vaste monde, en commençant par La Rochelle, Toulouse, Paris, Lyon, Londres ou encore Clermont Ferrand... Ne manquez pas d'aller à sa rencontre s'il passe près de chez vous: vous ne le regretterez pas. Et pour ma part, j'y retourne quand on veut ;-).

Présentation du spectacle sur le site du Théâtre Royal de Namur

Et une belle unanimité superlative dans la presse: articles dans Le Soir,  La libre Belgique, et un beau reportage dans le cadre de l'émission "Cinquante degrés Nord" du lundi 04/05/2009, émission disponible en streaming sur le site de la RTBF: ici (cliquez sur l'onglet "Plus de médias", et faîtes votre choix)

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