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Dans mon chapeau...
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31 décembre 2010

Cirque urbain

"iD",
par le Cirque Eloize

Théâtre Royal de Namur, le 30 décembre 2010

Un an après les jeux d'enfants poétiques de "Rain - comme une pluie dans tes yeux", le cirque Eloize est de retour à Namur pour un nouveau spectacle, cette fois mis en scène par le fondateur de la troupe, Jeannot Painchaud, dans une tonalité bien plus urbaine. Bruits de klaxon, stridulations d'alarmes anti-vol et ronronnements de moteurs accueillaient en effet dans la belle salle à l'italienne un public dont la moyenne d'âge avait effectué pour l'occasion - vacances scolaires et spectacle de cirque - un plongeon vertigineux. Pour une heure trente d'amourettes au clair de lune, de sauts ébouriffants en patins ou en vélo, de bagarres et échauffourées diverses sur fond de gratte-ciel et terrains vagues, le tout culminant dans un final époustouflant aux allures improbables de jeu vidéo. C'est là une occasion de plus de découvrir le nouveau cirque dans ce qu'il peut avoir de plus inventif et surprenant, au fil d'un spectacle peut-être moins poétique et émouvant que le précédent, mais à tous les coups, on vous l'a dit: époustouflant!

Présentation du spectacle, sur le site du Théâtre Royal de Namur

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30 décembre 2010

Une danse des bas-fonds

"Ego tango" de Caroline De Mulder31aji1cpryL__SL500_AA300_
4 étoiles

Editions Champ vallon, 2010, 217 pages, isbn 9782876735330

"Tout commence vraiment par les chaussures, rangées dans ses sacs exprès, veloutés ou satinés. Nous en changeons sitôt arrivées, laissant loin derrière l’hiver et la lumière basse et le cuir mouillé des jours de semaines. Nous perchons sur nos escarpés de jolies folles, nous nichons à des hauteurs épineuses, nous nous berçons, enlevées. Plus grandes que nous-mêmes, des gamines debout sur une chaise, et les hanches serrées de près, des oiseaux juchés sur des béquilles." (p. 21)

Une libération du poids du quotidien, un autre rapport au corps ou encore une forme d’équilibre. Voilà en peu de mots ce que l’héroïne de ce premier roman très maîtrisé recherchait, plus ou moins confusément, dans la pratique du tango, le tango dont elle nous confie qu’il "était tout ce que je n’étais pas (…)" (p. 34). Mais elle y trouvera pourtant tout autre chose, et c’est bien là le sujet d’"Ego tango": une passion dévorante, une forme de dépendance ou d’addiction - qui n’a rien à envier, sans doute, à celle créée par l’alcool, la cigarette ou l’une ou l’autre poudre délétère -, destructrice, à force.

C’est que sous la plume effilée, et dans la prose rythmée, scandée et palpitante, de Caroline De Mulder, le tango, que l’auteur a elle-même pratiqué intensément pendant quelques années, redevient ce qu’il était aux origines: une danse des bas-fonds, la danse des ouvriers des abattoirs et des bordels, la danse des filles perdues et des mauvais garçons qui les exploitent sans vergogne, un espace où se perdre – peut-être – sans retour.

Extrait:

"Alors toi aussi, un avant et un après (le tango du côté de l’après). Une vraie communion et deux tronçons de vie, dont la seconde censément plus glorieuse. Tous les soirs la même histoire: c’est à se demander ce que je faisais avant. Le tango est une revanche dont je ne peux plus me passer; je me sens grandie d’autant que je fais tourner toutes les têtes. La vraie vie n’existe plus. Rien dehors, ici diosa, ils disent déesse. Je suis ce que j’aurais pu être. Moi qui ai les mains vides et les yeux plus grands que le cœur." (pp. 71-72)

29 décembre 2010

Perplexe, que j'en reste...

18964540_jpg_r_160_214_b_1_CFD7E1_f_jpg_q_x_20080724_033525"Peau-d'âne" de Jacques Demy,
avec Catherine Deneuve, Delphine Seyrig et Jean Marais

Six ans après "Les parapluies de Cherbourg" - et après un passage par Hollywood -, Jacques Demy renouait avec ses complices de l'époque, Catherine Deneuve et Michel Legrand, pour adapter au format de la comédie musicale le célèbre conte de Charles Perrault, un film qui nous était justement proposé par Arte, dans le cadre de sa programmation de fin d'année.

Mais comment dire? Là où "Les parapluies de Cherbourg" distillaient un véritable charme au service d'un propos sans doute plus grave qu'il n'y paraissait au premier abord - car c'est bien la guerre d'Algérie que l'on y découvre en toile de fond -, ce "Peau-d'âne" m'est apparu comme singulièrement dépourvu de magie, ou de la plus petite trace de cette poésie dont Jean Cocteau avait su imprégner sa version de "La Belle et la Bête". Il n'y a ici rien, vraiment, qui sonne tout à fait juste: ni les costumes enflés au-delà de toute mesure, ni la musique, hésitant bizarrement à assumer son côté fleur-bleue pourtant indéniable, ni les quelques tentatives risquées ça et là de mettre en évidence la dimension la plus inquiétante, et pour ainsi dire psychanalytique, du conte de Perrault. Bref, voilà qui me laisse bien perplexe...

25 décembre 2010

Tous mes voeux pour un très heureux Noël et une bonne année 2011!

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Civilisation Vicus, Côte septentrionale du Pérou, Vase à goulot et anse pontée représentant un couple avec enfant, Musées royaux d'Art et d'Histoire, Bruxelles (Cliché Fée Carabine)

23 décembre 2010

Le retour du bon divertissement (bis repetita)

19590744_jpg_r_160_214_b_1_CFD7E1_f_jpg_q_x_20101116_110416"Harry Potter et les reliques de la mort (1ère partie)" de David Yates,
avec Emma Watson, Daniel Radcliffe et Rupert Grint

Voici donc la suite - et pas encore tout à fait la fin - des aventures du jeune sorcier né de l'imagination de J.K Rowling, le septimème et dernier tome de la saga d'Harry Potter se trouvant en effet adapté au grand écran en deux volets dont le second est attendu dans les salles l'été prochain.

Placé comme les trois épisodes précédents sous les commandes de David Yates, la première partie d'"Harry Potter et les reliques de la mort" renoue avec les qualités qui faisait d'"Harry Potter et le prince de sang-mêlé" un bon divertissement populaire: une adaptation fidèle du roman de J.K. Rowling, impeccablement filmée et jouée, où quelques moments plus contemplatifs - on découvrira au passage ici quelques beaux coins sauvages de la verte angleterre - contribuent à imposer une véritable atmosphère, sans pour autant peser trop lourdement sur le rythme du film et l'avancement de l'intrigue. C'est donc à nouveau un bon divertissement que le - presque - dernier volet de la saga Potter...

Pour en savoir plus au sujet d'Harry Potter, version papier: c'est ici.

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21 décembre 2010

"Une comédie de l’âme allemande", vraiment?

"Avant la retraite" de Thomas Bernhard41I91pA0n2L__SL500_AA300_
3 ½ étoiles

Editions de l’Arche, 2007, 137 pages, isbn 9782851810663

(traduit de l’Allemand par Claude Porcell)

Sous-titré "une comédie de l’âme allemande", "Avant la retraite" nous immerge dans le huis-clos oppressant qu’est la vie de Rudolf Höller, de ses sœurs Vera - avec laquelle il entretient une relation incestueuse - et Clara – que les blessures qu’elle a encourues pendant un bombardement ont clouée dans un fauteuil roulant -, et de leur bonne sourde-muette... Certainement pas par hasard, ainsi que le constate Vera :

"Une qui entendrait et qui parlerait
serait mieux naturellement d’une part
mais d’autre part il est bon
qu’elle ne puisse pas entendre
ni parler
c’est là-dessus que tout repose
qu’elle n’entende pas
et ne parle pas
imagine
qu’elle parle
et qu’elle entende."
(pp. 11-12)

Ancien SS et commandant d’un camp de prisonniers, Rudolf a échappé aux procès de l’après-guerre grâce à de faux papiers qui lui avaient été fournis par Himmler. Devenu par la suite juge dans sa ville natale, une fonction qu'il est à présent sur le point de quitter, atteint par la limite d'âge, il célèbre depuis lors chaque 7 octobre l’anniversaire de son sauveteur, et cela comme de bien entendu dans la plus stricte intimité. La comédie de l’âme allemande annoncée par le sous-titre apparaît dès lors comme celle d’un esprit imprégné d’un antisémitisme irréductible car "telle est la nature allemande" (p. 40), sans que les protestations de Clara - ses convictions politiques sont diamétralement opposées à celles de sa sœur et de son frère dont elle est par ailleurs dépendante - puissent y changer quoi que ce soit. Portrait-charge – mais on a connu Thomas Bernhard plus virulent -, comédie ou drame, "Avant la retraite" m’a en tout cas semblé curieusement privé d’enjeu, une longue suite de confrontations certes non dénuées de brio mais d’autant plus artificielles que leurs protagonistes ne sont que trop conscients d’y jouer un rôle écrit d’avance, obéissant à des règles précises encore que mystérieuses.

Extrait:

"Mais ce dont il s’agit
C’est de perfectionner
le rôle que nous jouons
parfois nous ne comprenons pas cela nous-mêmes
alors nous sommes plongés dans le malaise
mais nous savons exactement ce que nous avons à faire
Toi c’est avec le fauteuil roulant
c’est au moins aussi cruel
que moi avec Rudolf
Nous ne pouvons pas faire autrement
nous nous mentons
mais que c’est beau en fin de compte
ce que nous faisons
en le jouant
et ce que nous jouons
en le faisant
Contrevenir à nos lois
n’est plus possible"
(p. 42)

Un autre livre de Thomas Bernhard, dans mon chapeau: "Un enfant", "Maîtres anciens", "Le naufragé" et "Des arbres à abattre".

Et d'autres encore sur Lecture/Ecriture où Thomas Bernhard était l'auteur des mois d'octobre et novembre 2010.

20 décembre 2010

Rien de nouveau sous le soleil des Ravenelles

"Les révolutions (Le retour à la terre, tome 5)" de Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet
3 1/2 étoiles415_yRLA_lL__SL500_AA300_

Dargaud/Poisson pilote, 2008, 48 pages, isbn 9782205062359

Il n’y a pas grand-chose de neuf aux Ravenelles depuis notre dernière visite ("Le déluge (Le retour à la terre, tome 4)"). Capucine pousse à vue d’œil, sa couette à la Fifi Brindacier est presqu’aussi longue que celle de sa maman et elle gazouille à qui mieux mieux, assimilant sans guère d’effort le vocabulaire paternel, même le plus pointu. Et Mariette a décidé de reprendre des études, laissant régulièrement leur petite puce à la garde du seul Manu, que cette responsabilité angoisse un peu…

Quant au maire, à l’épicier, à l’ermite ou à la boulangère, ils restent toujours égaux à eux-mêmes, avec les mêmes effets sur le ménage Larssinet, tandis que tonton Ferri poursuit allègrement sa mise en abyme de la vie de tout ce petit monde dans les scénarios qu’il écrit pour son ami. L’effet de surprise, sans doute, s’émousse quelque peu, mais on n’en passe pas moins un bon moment avec ce cinquième tome du "Retour à la terre": c’est frais, léger, drôle et amusant encore que teinté d’une pointe d’ironie.

Extrait:

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(p. 25)

Les épisodes précédents: "La vraie vie (Le retour à la terre, tome 1)", "Les projets (Le retour à la terre, tome 2)", "Le vaste monde (Le retour à la terre, tome 3)" et "Le déluge (Le retour à la terre, tome 4)"

17 décembre 2010

Un avant-goût de l'éphémère

"J'installe le microfilm dans l'appareil et allume la lampe. Je n'aperçois tout d'abord qu'une bande noire, puis les premières pages du Star, l'un des rares bons quotidiens sud-africains, publié à Johannesburg. J'ai demandé à consulter l'année 1927. J'actionne la manette, et aussitôt articles et publicités défilent à toute allure sur l'écran. Dire que derrière chaque paragraphe se cachent des êtres humains - petits commerçants, rédacteurs, typographes, tous ces individus aujourd'hui disparus qui ont emporté avec eux leur histoire, leurs questions! Soixante-quinze ans plus tard, ils défilent en un éclair devant ma rétine. Pour moi, dérouler un microfilm est le geste qui permet le mieux de comprendre le sens du mot "éphémère". Rien ne me fait toucher d'aussi près la relativité que le fait savoir que je serai moi-même, dans moins d'un siècle, balayé, zappé, effacé d'un simple clic."

David Van Reybrouck, "Le Fléau", Actes Sud, 2008, pp. 130-131 (traduit du Néerlandais par Pierre-Marie Finkelstein)

16 décembre 2010

Pour l’amour de l’art

"Le tableau de Giacomo" de Geneviève Bergé405blog1
4 ½ étoiles

Editions Luce Wilquin, 205 pages, isbn 9782882534057

C’est vers Messine que Geneviève Bergé nous entraîne avec son nouveau roman, "Le tableau de Giacomo". Messine telle que nous la verrons jamais plus, car cette Messine-là fut rasée par trois tremblements de terre successifs, en 1693, en 1783 puis, surtout, le 28 décembre 1908. Enfin délivrée de la menace des pirates barbaresques, Messine en 1654 est encore – mais pour très peu de temps – sous contrôle espagnol. La ville jouit alors d’une tranquillité telle qu’elle n’en avait plus connue depuis longtemps, et elle met à profit ce calme retrouvé pour se laisser aller à la manie de la collection: "C’est que vivre sans manquer est impossible. Vivre sans espérer, ni désirer, vivre repu et satisfait, non, cela ne va pas. Personne ne vit de la sorte. Et surtout pas une société tout entière. Il faut chercher quelque chose, le vouloir, bientôt le vouloir à tout prix. Il faut d’abord que naisse l’attente, puis que l’attente se fasse recherche jusqu’à ce que la recherche devienne frénésie. La frénésie touche les très nantis, puis ceux qui le sont un peu moins, cela prend rapidement l’allure d’une obsession, c’est le grain de folie d’une époque, sa manière de danser sur les tables et de clamer qu’elle est vivante. La frénésie se suffit à elle-même, car l’objet dont elle s’empare importe peu en fin de compte, on peut collectionner pareillement les épices, les souvenirs de voyage ou les oignons de tulipe, c’est le geste qui compte." (pp. 25-26)

En l'occurrence, il s'agit de collections d'oeuvres d'art, et tout particulièrement de la plus belle et plus riche des collections siciliennes de l'époque, celle de Don Antonio Ruffo, que seule surpasse en Italie celle de Côme III de Médicis, l'unique mécène à s'intéresser aussi, aux côtés de Don Antonio, aux artistes du Nord de l'Europe, Jordaens, Dürer ou Van Dijk... Certes financée par les deniers de Don Antonio, cette prestigieuse collection n'en est pas moins l'oeuvre d'un seul homme, véritable amoureux des arts à défaut d'avoir les moyens de satisfaire sa passion en son nom propre, le courtier de Don Antonio, Giacomo di Battista: "Voilà un homme, Giacomo, qui consacre sa vie, oui, toute sa vie, à constituer une collection d’art, et pas des moindres. Il le fait avec passion. Avec acharnement. Avec précision et méticulosité, avec curiosité aussi. Une curiosité qui se teinte d’avidité. Tous les jours de sa vie, il s’informe, il rencontre, il négocie, il achète. Il transporte parfois lui-même un tableau, puis il surveille l’installation jusqu’en ses moindres détails. Cette collection, il la chérit peu à peu de toute son âme et de toutes ses forces, et il la voit, avec fierté, devenir une des plus importantes de l’île et même de la péninsule." (p. 122)

En 1654, la vue défaillante, Giacomo souffre de plus en plus visiblement des atteintes de l'âge. Il souffre surtout de voir son influence sur son maître – et sur sa collection – remise en question par l'intervention d'un rival, le consul de Hollande à Messine, peintre parfaitement assimilé à la manière italienne et méprisant les artistes du Nord, Abramo Casembrot. Attendant d'un jour à l'autre l'arrivée à Messine de ce qui est sans doute sa dernière grande commande au nom de Don Antonio – rien moins qu'une toile de Rembrandt -, Giacomo joue donc son va-tout, sa dernière chance d'imposer sa marque sur la prestigieuse collection des Ruffo et d'affirmer son influence sur son employeur. "Le tableau de Giacomo" est avant tout son histoire, l'histoire de son attente anxieuse et fiévreuse puis de son émerveillement devant l'oeuvre tant attendue qui ne ressemble vraiment à rien de ce qu'il avait pu voir auparavant. Traité tout en finesse, en intelligence et en sensibilité, c'est – à travers l'image de ce vieil homme et de son dernier bonheur d'amoureux des arts – un très beau portrait de l'amateur d'art, qui ne cherche pas à posséder l'objet de sa flamme – ne peut pas le posséder – mais simplement, sincèrement, et parfois non sans déchirement, l'aime d'amour et s'en émerveille. Et je ne crois pas qu'on ait jamais si bien parlé de ce sentiment-là...

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Rembrandt van Rijn, Aristote contemplant un buste d'Homère, Metropolitan Museum of Art, New York (source)

Extrait:

"Il attendait. Il se sentait prêt à attendre le temps qu’il faudrait. Depuis le premier jour, alors que c’était forcément inutile et insensé, alors que c’était franchement stupide même, il guettait le moment où arriverait des nouvelles. Il était devenu la femme du marin, celle qui se porte sur la grève dès l’aube après une nuit d’orage. Il était la mère du jeune soldat parti se battre, celle qui espère jour après jour une lettre et quelques nouvelles. Il était l’enfant couché dans la paille, attendant que l’œuf éclose. Le vieillard sur son grabat, que la mort viendrait délivrer. Et la femme priant à la cathédrale devant la statue de la Vierge. Il était même le Juif pour qui viendrait un jour le messie annoncé. Dans le lointain, quelque chose se préparait, dont il ne connaissait ni le nom ni la forme ni les contours, mais dont l’arrivée le comblerait, c’était une certitude. Le tableau qu’il avait commandé ne ressemblerait en rien à ceux qu’il avait déjà rassemblés. Ce n’était pas de l’espoir, car il nourrissait un espoir véritable lors de chaque commande, si modeste fût-elle parfois, non, c’était une certitude. Car un homme du Nord qui ne s’était jamais frotté aux délicatesses italiennes, un qui ne sortait pas de sa ville ni de son quartier, un peintre qui ne humait que la brume et les soleils froids, un peintre surtout qui se montrait assez détaché des modes pour penser que la Hollande suffisait à son art, et qui, dans cette lumière-là, de son pays, avait commis la gravure que Giacomo avait pu se procurer, assurément, il n’était pas pensable qu’il pût livrer une copie même lointaine de ce que produisaient les maîtres connus sur l’île et sur la péninsule !" (p. 96)

11 décembre 2010

L'Orient entre fantasme et réalité

"De Delacroix à Kandinsky - L'orientalisme en Europe",
Musées Royaux des Beaux-Arts, Bruxelles,
Jusqu'au 9 janvier 2011

L'égyptomanie gallopante suscitée par la campagne d'Egypte de Napoléon Bonaparte (1798) et surtout les voyages devenant, dans le courant du XIXème siècle, de plus en plus aisés, ont marqué la naissance d'une véritable fascination pour l'Orient dans le chef de nombreux artistes européens, pour lesquels l'Italie, sans perdre pour autant de son intérêt, cesse de représenter le seul passage obligé du traditionnel "Grand Tour".

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Jean Lecomte du Nouÿ, L'esclave blanche, Musée des Beaux-Arts, Nantes (source)

Le terme d'Orient est d'ailleurs à comprendre ici dans un sens très large, recouvrant aussi bien l'héritage que l'occupation mauresque a laissé en Espagne que le Maghreb, l'empire ottoman, l'Egypte ou la Palestine... Et cette fascination toute neuve relève tout autant du fantasme érotique des scènes de bain ou de harem (telle L'esclave blanche de Jean Lecomte du Nouÿ qui orne d'ailleurs l'affiche de l'exposition) que d'un exotisme quelque peu superficiel, d'une redécouverte des décors authentiques de l'histoire biblique ou, en particulier chez les plus modernes des artistes représentés, Henri Evenepoel ou Vassily Kandinsky, d'un véritable éblouissement devant une nouvelle qualité de lumière et une palette de couleurs vibrantes.

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Henri Evenepoel, Marché d'oranges à Blidah, Musées Royaux des Beaux-Arts, Bruxelles (source)

Aucune des multiples facettes de ce que le guide du visiteur qualifie à juste titre de véritable phénomène culturel - plutôt que d'un courant artistique unifié - n'est passée sous silence dans cette belle exposition qui se poursuit encore aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles jusqu'au 9 janvier 2011: un festin de lumière et de couleurs bienvenu dans la grisaille hivernale!

Le site officiel de l'exposition

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