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Dans mon chapeau...
Dans mon chapeau...
31 mars 2009

Du temps et ne savoir qu'en faire...

"Tout au bord" de et avec Bernard Cogniaux et Marie-Paule Kumps

Namur, Grand Manège, le 28 mars 2009

En couple à la scène comme à la ville, Bernard Cogniaux et Marie-Paule Kumps étaient déjà passés une première fois de l'autre côté de la plume et du papier, le temps d'un spectacle nourri de leur expérience de jeunes parents. Mais depuis les années ont passé, les enfants ont grandi et quitté le nid. Et le temps est venu de rééditer l'exercice pour nous faire partager les heurs et malheurs d'un couple qui retrouve du temps pour soi, et qui ne sait qu'en faire... C'est finement observé, et tour à tour drôle et touchant, pendant les trois premiers quarts du spectacle. Et puis, rien ne va plus... Ou plutôt, ça va trop loin et on n'y croit plus vraiment...

Mais si l'atterrissage est difficile, le vol, lui, est bien agréable. C'est à voir donc, encore pour un soir, au Grand Manège à Namur.

Présentation de la pièce sur le site du Théâtre Royal de Namur

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28 mars 2009

Les grands espaces de l'Oregon

file2805"Outwest", photographies de Christian Lutz

Bottes, chemises à carreaux et stetson... Les membres de la famille Davis, éleveurs de bétail dans l'Oregon, n'échappent pas aux clichés. Mais pourtant le regard de Christian Lutz va plus loin, qui se fait tour à tour insolite, touchant, amusant. Entre western spaghetti et images de l'ordinaire d'une vie dans un environnement très rude, celui des espaces illimités et inhospitaliers du désert de l'Alvord.

C'est à voir dans l'amphithéâtre du Théâtre Royal de Namur, jusqu'au 4 avril.
Exposition accessible le samedi de 11h à 18h, et les soirs de spectacle.

Présentation de l'exposition sur le site du Théâtre Royal de Namur

27 mars 2009

Compulsions secrètes

"Pétales et autres histoires embarrassantes" de Guadalupe Nettel41qHPPT1YZL__SL160_AA115_
4 étoiles

Actes Sud, 2009, 142 pages, isbn 9782742782185

(traduit de l’Espagnol par Delphine Valentin)

"Pétales et autres histoires embarrassantes" nous arrive au milieu d’un contingent de livres mexicains – salon du livre oblige. Mais autant dire d’entrée qu’à l’épreuve de la lecture, cette indication de provenance ne présente qu’un intérêt tout au plus circonstanciel.

Des six nouvelles rassemblées dans ce recueil, la première - "Ptôse", histoire d’un photographe qui collabore avec un chirurgien plasticien spécialiste des paupières et qui développe petit à petit une obsession douce quoique pas sans conséquence pour cette partie du corps – se déroule à Paris. La troisième - "Bonsaï", récit de la lente décomposition d’un mariage où le conjoint se prend à s’identifier de plus en plus étroitement à un cactus – nous emmène au Japon, dans le jardin botanique d’Aoyama. Mais toutes ces nouvelles, au fond, pourraient se dérouler n’importe où, tant Guadalupe Nettel a su y épingler, tout en finesse et subtilité, six de ces obsessions, manies inoffensives et compulsions inavouables dont nous sommes tous peu ou prou affligés mais que les gens normaux réussissent à refouler et occulter soigneusement, n’en laissant rien paraître à l’observateur extérieur: le trait n'est jamais si forcé que l'on ne puisse y reconnaître un fond - un peu, beaucoup - de vérité, et on ne cesse jamais d'y croire...

Au petit jeu des comparaisons, c’est sans doute le nom de la japonaise Yôko Ogawa qui s’impose en premier lieu, par la délicatesse avec laquelle l’auteur nous amène progressivement à décaler notre regard. Mais on pourrait penser aussi à Christos Chryssopoulos et à son beau roman "Le manucure" pour l’impeccable construction dramatique de ce recueil et son implacable crescendo de l’à-peine-insolite au tout à fait bizarre, du doucement givré de "Ptôse" ou du voyeurisme sans grand danger de "Transpersienne" à l’étrangeté elle fort inquiétante du "Bézoard". Bref - et même si ni les paysages ni l’histoire, ni la culture mexicaine ne tiennent une grande place dans ces "Pétales" -, c’est là une fort jolie découverte venue du pays des descendants des Aztèques.

Extrait:

"J’avoue cependant que, souvent, tandis que je déambule dans les rues ou dans les couloirs de quelque édifice, l’envie me saisit soudain de faire une photo, pas de paysages ou de ponts comme le fit naguère mon père, mais de paupières insolites que de temps en temps je repère dans la foule. Cette partie du corps, que j’ai vue toute mon enfance, et sans jamais ressentir le moindre dégoût, a fini par me fasciner. Exhibée et cachée par intermittence, elle oblige à rester en état d’alerte si l’on veut découvrir  quoi que ce soit qui en vaille vraiment la peine. Le photographe doit éviter de cligner des yeux en même temps que le sujet étudié pour capturer le moment où l’œil se ferme comme une huître joueuse. J’en suis venu à penser que cela nécessite une intuition particulière, proche de celle d’un chasseur d’insectes, et je crois qu’il y a peu de différence entre un battement d’ailes et un battement de cils." (pp. 17-18)

Plusieurs livres de Yôko Ogawa sont présentés sur Lecture/Ecriture.

Et tout un dossier y est consacré à la littérature mexicaine.

26 mars 2009

"La mort, je le sais, me suit à la trace..."

J'ai quitté mes steppes natales;
C'est fini, fini sans retour,
Les feuilles des grands tilleuls pâles
Ne tinteront plus sur mes jours.

Oui, la maison sans moi se tasse,
Depuis longtemps, mon vieux chien dort;
Dans les rues de Moscou, la mort,
Je le sais, me suit à la trace.

J'aime cette ville pourtant,
Si décrépite, s'embourbant,
Ville où l'antique Asie somnole
Comme étalées sur ses coupoles.

Quand le croissant me paraît trop
Lumineux et qu'il m'ensorcelle,
Mes pas s'en vont vers mon bistrot
Toujours par la même ruelle.

Dans ce repaire, quelle fracas!
Je bois, la nuit, dans des buées,
Avec des bandits, la vodka,
Lis mes vers aux prostituées.

Mon coeur bat fort, mon mal s'aggrave...
M'oubliant, je dis pour finir:
« Comme vous, je suis une épave,
Sur mes pas, pourquoi revenir!

Oui, la maison sans moi se tasse,
Depuis longtemps mon vieux chien dort;
Dans les rues de Moscou, la mort,
Je le sais, me suit à la trace...

Serge Essénine, in "Anthologie de la poésie russe" - Edition de Katia Granoff, Poésie/Gallimard, 1993, p. 421

Un autre poème de Serge Essénine, dans mon chapeau: ici

Et une lecture des "Lettres à Essenine" de Jim Harrison:

23 mars 2009

Un cheminement vers le monde

"L’Intérieur du monde" de Jean-Pierre Lemaire4164TJDMXAL__SL160_AA115_
4 étoiles

Cheyne, 2007, 98 pages, isbn 9783841160662

De la dernière maladie du père au retour de la lumière sur la mer, après une averse estivale, les cinq sections de "L’intérieur du monde" - "Simple mortel", "Noé", "Chants du purgatoire", "La retenue" et "Les bras ouverts" – retracent un cheminement spirituel. Une lente méditation allant de la prise de conscience de se trouver désormais aux avant-postes, face à la vieillesse et à la mort, vers un regard renouvelé sur le monde alors que le poète constate:

"La vie t’est rendue
comme le soir, après la pluie,
l’odeur des iris au fond du jardin."
(p. 91)

C’est un parcours par mille émotions et sensations, de la douce lumière baignant les paysages toscans où "Le ciel léger repose / sur la pointe des cyprès." (p. 46) à l’ombre fraîche d’une chapelle dans la chaleur de l’été, du craquement des feuilles mortes au bleu lumineux et doux d’une "Crucifixion" de Giotto *. Ce sont autant de perles recueillies d’un œil attentif, condensées dans le flux d’une langue fluide et souple, qui semble couler tout naturellement.

Extrait :

"Debout, tu as longtemps éclipsé le monde,
dieu volcanique des commencements,
et tu l’as entraîné avec toi sous terre.
Il n’y a plus que des fantômes d’arbres,
le décor de ta ville au bord de la mer,
des flocons de couleur. Les enfants seuls
croient encore assez au monde pour jouer.
Parmi les racines, ton masque de sang
est devenu un masque de cristal
où je te revois faible, endormi, suivant de loin
le lent travail, dans la lumière sépulcrale,
de ton visage qui se recompose."
(p. 19)

* "Giotto", un poème tiré de "L'Intérieur du monde" et reproduit sur Terres de femmes.

D'autres poèmes de Jean-Pierre Lemaire, dans mon chapeau: "Marchant sur le moût des feuilles en hiver..." et "Bologne".

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21 mars 2009

Suspense psychanalytique

18464061"Pas de printemps pour Marnie" d'Alfred Hitchcock,
avec Tippi Hedren et Sean Connery

Marnie Edgar change d'identité et de couleur de cheveux comme d'autres changent de chemise. Et il faut bien reconnaître que puisqu'elle gagne sa vie en dévalisant ses patrons successifs - elle semble tout simplement ne pas pouvoir agir autrement -, il vaut mieux pour elle qu'elle sache recouvrir ses traces... Mais lorsqu'elle est entrée comme comptable dans la maison d'édition de Mark Rutland, Marnie a trouvé plus fort qu'elle: un employeur qui n'a pas tardé à la percer à jour, en même temps qu'il tombait amoureux d'elle.

Avec ce suspense psychanalytique, Alfred Hitchcock a offert à Tippi Hedren et Sean Connery deux rôles magnifiques, fascinants par les zones d'ombre dont ils ne manquent ni l'un ni l'autre. Cela nous vaut des controntations mémorables entre les deux acteurs, alors que Mark-Sean tente d'amener Marnie-Tippi, qu'il a forcée à l'épouser par un chantage peu reluisant, à affronter les vieux démons qui ont fait d'elle une voleuse compulsive, affligée en outre d'une peur panique du rouge et d'un dégoût affirmé pour la gent masculine. Et si "Pas de printemps pour Marnie" reste bien loin des multiples rebondissements de "La mort au trousse" et de la tension de "Vertigo" ou des "Oiseaux", les remarquables prestations de ses deux interprètes en font un des très bons films d'Alfred Hitchcock. Et certainement un de mes préférés...

D'autres films d'Alfred Hitchcock, dans mon chapeau: "Les amants du capricorne", "Soupçons", "Mr and Mrs Smith", "Correspondant 17", "Sabotage", "Les 39 marches" et "Fenêtre sur cour"

20 mars 2009

L'annonce d'un redoux... (2)

Pour le premier jour du printemps: les premiers perce-neige dans les jardins de Kensington...

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Kensington Gardens, Londres (cliché Fée Carabine)

L'annonce d'un redoux... (1)

17 mars 2009

Kate Winslet au sommet de son art

19051728"Le liseur" de Stephen Daldry,
avec Kate Winslet, Ralph Fiennes et David Kross

Auteur d'une belle adaptation du roman de Michael Cunningham, "Les heures", Stephen Daldry vient de récidiver en signant cette autre adaptation très réussie du célèbre roman de Bernhard Schlink, un livre qui m'avait profondément marquée lors de ma lecture il y a déjà quelques années: l'histoire d'une jeune allemand, étudiant en droit, qui reconnaît dans l'une des accusées du procès d'anciennes gardiennes d'un camp nazi une femme avec laquelle il a eu une liaison alors qu'il était encore adolescent.

L'intelligence de Stephen Daldry, dans le cas présent, a été de reconnaître que cette histoire d'amour, de dévastation et de culpabilité était bien assez forte par elle-même, et qu'il n'était pas nécessaire d'en rajouter à grands renforts de violons. Il nous livre donc un film sobre, très classique et servi par des acteurs impeccables au premier rang desquels on retrouve Kate Winslet au sommet de son art, dans le rôle de cette femme que l'on devine abîmée et qui a aussi abîmé tant de gens et de choses autour d'elle...

16 mars 2009

Réalisme social

"Eux" de Joyce Carol Oates41JKGqNMuyL__SL160_AA115_
4 étoiles

Points/Signatures, 2008, 650 pages, isbn 9782757809440

(traduit de l’Anglais par Francis Ledoux)

"Eux", ce sont Maureen et Jules Wendall, toute leur tribu, leurs parents, Loretta et Howard, leur petite sœur Betty, et le monde où ils vivent, celui des blancs pauvres dans la Detroit des années 1930 encore marquées par la Grande Dépression jusqu’aux années 1960. C’est leur histoire que Joyce Carol Oates a entrepris de raconter dans ce livre, couronné par le National Book Award en 1970, et que l’on peut encore considérer, toutes proportions gardées, comme une de ses œuvres de jeunesse.

Et très vite, le doute s’insinue, lancinant, face à ce roman où les choses ne semblent jamais rentrer dans l’ordre, ou rien ne prend jamais sens. Face à la longue litanie des déboires qui frappent cette famille "ordinaire" (?), l’on se dit que tout cela ne peut pas être vrai : la longue série des déveines, guignes, brutalités, maladies, méfaits de l’alcool ou pure et simple bêtise qui fait illico replonger celui qui semblait un tant soit peu commencer à se sortir de sa misère. Quand ce n’est pas tout simplement, ainsi que le note Jules, "son statut de fils, de frère" qui en fait "un être entraîné vers le fond de la rivière par les chaînes du sang et de l’amour" (p. 285).

Mais pourtant, Joyce Carol Oates avait averti son lecteur d’entrée de jeu : tout est vrai, et cette histoire est celle d’une de ses anciennes étudiantes en cours du soir à l’université de Detroit, avec laquelle elle avait repris contact quelques années plus tard et entretenu une correspondance qui lui avait fourni les matériaux de ce gros roman touffu. Et c’est lorsque le déroulement du récit atteint l’instant précis de cet échange de lettres entre Maureen Wendall et son ancien professeur devenue écrivain que l’on commence à comprendre le projet poursuivi à travers l’écriture de "Eux". Au moment où l’héroïne prend l’auteur à parti en rejetant en bloc les arrangements de la littérature, l’ordre et la forme que celle-ci  impose aux faits et que la réalité réfute, l’on comprend enfin que Joyce Carol Oates a tenté ici de relever le défi et d’écrire un roman qui restitue le désordre du monde. Son pari est d’ailleurs réussi. Et c’est en cela, surtout, que "Eux" est un grand roman réaliste dont la lecture se révèle une expérience passionnante. Même si elle se fait aussi pesante et cela dans tous les sens du terme : par l’atmosphère plombée qui imprègne ce livre d’un bout à l’autre et parce qu’avec ses 650 pages bien tassées, l’édition de poche de la collection Points/Signatures ne rentre plus vraiment dans la catégorie des livres maniables que l’on peut facilement glisser dans son sac et emporter partout avec soi…

Extrait :

"Vous avez dit : « La littérature donne forme à la vie », je me rappelle que vous avez dit cela très clairement. Qu’est-ce que la forme ? Pourquoi est-ce mieux que la façon dont la vie se présente toute seule ? Je déteste tout cela, tous ces mensonges, tant de mots dans tous ces livres. Ce que j’aime lire dans cette bibliothèque, ce sont les journaux. Je veux savoir. Le vieux lit un journal, et l’homme au nez qui coule aussi. Comme moi, ils veulent découvrir ce qui se passe, ce qui est réel. Ils n’ont pas de temps dans leur vie pour les choses fabriquées. Mais je me rappelle que vous avez dit cela de la forme." (p. 435)

Un autre livre de Joyce Carol Oates, dans mon chapeau: "Nous étions les Mulvaney"

Et d'autres encore sur Lecture/Ecriture

15 mars 2009

Un beau voyage sonore

Quentin Dujardin en concert,
avec Jalal El Allouli, Tuur Florizoone et Fred Malempré

Théâtre Royal de Namur, le 12 mars 2009

Amené au jazz par la découverte du travail de Philippe Catherine et de Pierre van Dormael, puis formé aux conservatoires de Bruxelles et de Gand, le dinantais Quentin Dujardin est ensuite parti sur les routes à la recherche d'un univers propre. Des sonorités andalouses, marocaines ou malgaches sont ainsi venues se mêler à celles de sa guitare.

Aussi, le concert qu'il a donné ce jeudi soir au Théâtre Royal de Namur, dans la foulée de la sortie de son quatrième album "Veloma", avec la complicité de Jalal El Allouli (violon et chant), Tuur Florizoone (accordéon chromatique) et Fred Malempré (percussions) fut un beau voyage coloré à travers un monde sonore aussi surprenant qu'émouvant, de Durnal à Marrakech.

La page de Quentin Dujardin sur myspace.

Quentin Dujardin avait également composé la B.O. du spectacle "Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran", présenté au Théâtre Royal de Namur plus tôt dans la saison.

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