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Dans mon chapeau...
Dans mon chapeau...
13 février 2009

Amour, maladie, c'est du pareil au même...

"Tu veux savoir comment ma maladie a commencé? La vérité est: pour l'heure je n'en sais même rien. Les maladies ont un commencement? Ou elles sont comme l'amour: de ces choses qui n'existent qu'après qu'on s'en est souvenu?"

Mia Couto, "Un fleuve appelé temps, une maison appelée terre", Albin Michel/Les grandes traductions, 2008, pp. 156-157 (traduit du Portugais par M. Lapouge-Pettorelli)

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12 février 2009

Détournement et subversion

"Règlements de contes" de Vera Feyder1516368
4 étoiles

Lansman, 1997, 59 pages, isbn 2872821775

Entretissant les trajectoires de deux personnages tout droit sortis d’un poème de Victor Hugo ("Bon conseil aux amants") aux destinées des héros des contes de Perrault, Vera Feyder nous en propose une relecture quelque peu iconoclaste - à tel point que Charles et Victor assistant au spectacle, du lieu où ils se trouvent, s’en voient fort marris. Ainsi, Corentin, chat botté de son état, met toute sa diligence et son astuce, non à servir son maître, monsieur de Kara, fausse noblesse fort peu sympathique au demeurant, mais bien à lui piquer sous son nez sa fiancée. Et Rossetta, militante communiste qui n’a pas peur du loup, porte haut ses couleurs politiques dans son capuchon rouge…

Comme dans "Petite suite de pertes irréparables", le texte séduit par son rythme endiablé et par son irrésistible drôlerie. Mais il se révèle aussi plus grave, plus profond et par là-même plus subversif qu’on ne pourrait le penser à première vue. Car en passant ainsi à la moulinette les contes de fée de notre enfance, Vera Feyder nous invite à préserver l’irrévérence, l’imagination et la liberté face aux enchantements clé-sur-porte de notre monde contemporain. Et elle offre une résonance inattendue à cette confidence du prince charmant: "Je viens d’un pays où les gens meurent d’ennui. C’est une épidémie qui s’est abattue comme cela, un jour, amenée par on ne sait quel marchand cousu d’or et d’images, dont il s’est mis à gaver les gens. Nul n’a plus alors vécu que d’images toutes faites et d’argent comptant. Au début, c’était de la folie; une fièvre inaccoutumée que certains ont pu prendre d’abord pour une poussée de vie. Mais c’était plutôt la mort aiguillonnant la vie, la refoulant dans ses manifestations les plus simples. Les gens, soudain, ne se sont plus parlé. Ni bonjour, ni bonsoir. Plus aucune considération sur le temps qu’il fait, ni sur celui qui passe. Plus personne n’a eu quoi que ce soit à dire à qui que ce soit. La fureur de voir et de posséder a dépassé celle de vivre et l’a absorbée. C’est pourquoi tout ce qui est vivant et combattant me touche." (p. 43)

Extrait :

Kara (le poursuivant) : Elle aura honte de vous… Elle n’osera vous présenter à personne. (Il le suit dans les couloirs) Ah, vous ne vous êtes jamais regardé… Quatre pattes, des poils partout, deux canines longues comme ma main… et faux-jeton avec ça…
(Il a rejoint Corentin sur le seuil. Tonnerre. La pluie tombe, drue)
Corentin (souriant) : J’ai de belles moustaches. Un bon et bel esprit. De très beaux yeux. Beaucoup d’hommes ne peuvent en dire autant. (Il descend les marches du perron)
N’allez pas plus avant, vous n’êtes pas sortable. Ah, j’oubliais, une dernière chose… Ce chat dont je vous ai parlé, qui était mon ami, on l’appelait  "le chat-qui-s’en-va-tout-seul"... Eh bien, il a fait son chemin dans la vie. Et dans l’histoire. La liberté lui a réussi.
Kara : Jamais entendu parler.
Corentin :
Vous lisez peu, il est vrai. Les bêtes pas plus que les gens ne vous intéressent.
Kara:
J’ai d’autres chats à fouetter.
Corentin: C’était vrai. C’était. Moi parti, vous allez bien vous ennuyer. (Il s’éloigne)
Il reste un peu de ragoût pour le dîner. J’ai ôté la mouche, il devrait être mangeable…
(pp. 31-32)

D'autres livres de Vera Feyder, dans mon chapeau: "Petite suite de pertes irréparables", "Caldeiras" et "Liège".

Et l'avis de Mapero sur un autre de ses livres: "Le derelitta"

10 février 2009

L'école des femmes, version coréenne

18427541"L'Arc" de Kim Ki-Duk,
avec Seo Min-Jeong

Canvas (deuxième programme de la VRT, télévision belge d'expression flamande) a l'excellente habitude de proposer tous les dimanche soirs une programmation de cinéma d'auteur, du monde entier, et cela à une heure certes tardive mais pas complètement indécente (vers 21h30-22h)*.

J'ai donc sauté sur l'occasion qui m'était offerte ce dimanche de découvrir "L'Arc" du cinéaste coréen Kim Ki-Duk, dont j'avais aimé "Printemps, été, automne, hiver... et printemps" - un film très contemplatif, magnifiant les beautés de la nature, et néanmoins dramatique, histoire de crime et de rédemption sur fond de passage des saisons dans un ermitage isolé au milieu d'un lac. Autant dire que je n'ai pas été trop dépaysée au début de "L'Arc", en me retrouvant sur un bateau, perdu au milieu des flots et fort loin du monde. Des années plus tôt, le propriétaire de ce bateau avait recueilli une petite fille qu'il a depuis élevée avec l'idée d'en faire sa femme quand elle atteindrait ses dix-sept ans. Au moment où nous le retrouvons, quelques mois à peine le séparent encore de la date prévue pour ce mariage. Sa pupille est devenue très belle, et le vieil homme doit bien souvent recourrir à l'arc dont il joue en virtuose pour tenir à distance les pêcheurs de passage qui la convoitent eux aussi. Et bien sûr, les choses commencent bientôt à dérailler...

Mais si tout ça vous a un petit air d'école des femmes, le film de Kim Ki-Duk est beaucoup moins drôle que la pièce de Molière. Et à vrai dire, je ne sais pas trop ce qu'il est tant il semble ne pas savoir sur quel pied danser, à force d'hésiter entre la bluette sentimentale (et ses couchers de soleil, vrais chromos de carte postale - c'est juste too much!), le drame et la pantomime (le vieil homme et sa pupille semblent se comprendre sans parler, et ma foi, ils se font vraiment comprendre du spectateur sans prononcer le moindre mot!), avant de virer vers le fantastique - de façon assez peu convaincante, à mon avis - dans le dernier quart d'heure. Bref, cela valait certainement le coup d'oeil, et ce n'était pas désagréable à regarder, mais pour le coup, je n'ai pas vraiment été séduite.

Les avis postés sur la toile sont d'ailleurs assez partagés: du plutôt positif  (ici et ) au très sévère (ici), en passant par le guère enthousiaste (ici ou )

* En parlant d'heure de diffusion indécente, Arte a programmé "Le cercle", magistral réquisitoire de Jafar Panahi traitant de la condition féminine en Iran, ce mercredi 11 février... à 23h10. Sans commentaire ;-).

8 février 2009

Fil rouge pour un coup de sang

"Sans début ni fin – Petite parabole" d’Anne HerbautsSANS_DEBUT_NI_FIN_1
5 étoiles

Editions Esperluète, 2008, sans pagination, isbn 9782930223936

Le peloton de fil rouge qui orne la couverture se dévide à l’intérieur du livre, tout au long d’une bande de papier plié en accordéon. Et se dévident du même coup les strophes d’un poème - évocation touchante, troublante, des dépourvus - et des illustrations nées de l’assemblage de cailloux, de bouts de ficelles, de bouts de papier, de bouts de tissus, de bouts de bois et de vieux boutons... Tout un petit monde désordonné, insolite et fragile, réuni en une vraie cour des miracles. Des petites merveilles de poésie, d’imagination et d’inventivité qui en disent plus long que bien des discours, en un plaidoyer éloquent qui évite l’écueil des bons sentiments comme celui du cynisme.

Car présentant son livre il y a quelques jours sur les ondes de Musiq’3 (radio belge), Anne Herbauts ne s’en était pas cachée : "Sans début ni fin – petite parabole" est un cri de révolte, né d’un vrai coup de sang face à notre société de consommation qui pratique l’exclusion, à tour de bras, des sans-papiers, des sans-abris, des sans-permis, mais toujours des hommes traités, c’est sûr, sans plus aucun égard…

J’ai en tout cas un gros coup de cœur pour ce petit livre inclassable, une très belle réalisation de plus au catalogue des éditions Esperluète qui allient toujours avec bonheur texte et illustration.

Extrait:

 

image_Herbauts

 

"Et encore les sans cabane
qui cherchaient
ombre
où attendre.
Ils plantaient un arbre, alors,
alors, le merle chantait."

 

Présentation de "Sans début ni fin", sur le site de l'éditeur

D’autres ouvrages des éditions Esperluète sont présentés sur Lecture/Ecriture :
"Ce qu’on oublie (Souvenir trois)" (Annick Ghijzelings et Anne Leloup)
"Désir" (Frédérique Dolphijn et Loren Capelli)
"Le jardin (Souvenir un)" (Annick Ghijzelings et Anne Leloup)
"Les oiseaux de Messiaen" (Nicole Malinconi et Mélanie Berger)
"La petite" (Pascale Tison et Loren Capelli)
"La porte de Cézanne" (Nicole Malinconi et Jean-Gilles Badaire)

7 février 2009

Un coup d'oeil dans le rétro

thumb_gr_ico_affiche"Actualité namuroise - Rétrospective 2008"
Galerie du Beffroi, Namur

Il y a des activités saisonnières qui, c'est réglé comme du papier à musique, reviennent chaque année à la même époque. Ainsi, les galeries du Beffroi accueillent chaque année en cette période une exposition de clichés des photographes de presse namurois.

C'est une belle occasion de jeter un dernier coup d'oeil dans le rétro vers l'année révolue. Autant de tranches de vie de la cité s'y font jour en autant de photos souvent prises sur le vif, révélatrices des tensions politiques comme de la vitalité culturelle, festive ou sportive de la capitale wallonne. Avec en guest star, quelques apparitions teintées de mystère d'Olivier Gourmet, président du jury lors de la dernière édition du Festival du Film Francophone.

Galerie du Beffroi,
13, rue du Beffroi,

En semaine de 11h à 18h, et le dimanche de 12h à 18h
jusqu'au 1er mars 2009

Présentation de l'exposition, sur le site de la ville de Namur

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6 février 2009

"In the bleak midwinter" (2)

Chutes de neige et gel persistant, la Vierge et l'Enfant se sont encapuchonnés d'un duvet blanc...

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Louvain-la-Neuve (Cliché Fée Carabine)

"In the bleak midwinter" (1) et (3) 

Et ne manquez surtout pas le très beau reportage qu'Hugues van Rymenam, alias le fugitif, a réalisé pendant ces jours de grand froid. Ça commenceici, et c'est tout simplement magnifique.

5 février 2009

De jeunes hommes en colère, encore...

"Lucrèce Borgia" de Victor Hugo,
avec Valérie Bauchau dans une mise en scène de Frédéric Dussenne

Atelier Théâtre Jean Vilar, Louvain-la-Neuve, le 30 janvier 2009

De l'Amérique de Serge Kribus à Ferrare renaissante sous la plume de Victor Hugo, c'est presque la même révolte contre la société comme elle va, ou plus sûrement, comme elle ne va pas: la richesse et le pouvoir aux mains de quelques uns - un Alphonse de Ferrare en costume sombre que l'on croirait tout droit échappé d'un bureau de Wall Street ou de la City -, la corruption et l'arbitraire. Et ce sont presque les mêmes jeunes hommes en colère, vêtus des mêmes blousons de cuir sur la scène de l'Atelier Théâtre Jean Vilar.

Mais au milieu de ces hommes, Victor Hugo a placé une femme, et quelle femme! L'épouse d'Alphonse de Ferrare, fille du pape Alexandre VI et soeur de César, dit le Valentinois. J'ai nommé Lucrèce Borgia dont Victor Hugo a choisi d'épouser la légende noire, l'inceste, l'adultère, les meurtres et le poison, pour nous montrer le drame d'une mère rejetée par un fils qui abhorre son visage de criminelle alors même qu'il est le seul être au monde qu'elle aime véritablement... Avec Valérie Bauchau incarnant Lucrèce tout en justesse, et une mise en scène sobre et dépouillée, Frédéric Dussenne nous offre ici une vision émouvante d'une pièce qui semble ainsi ne pas avoir pris une seule ride depuis sa création en 1833.

Présentation du spectacle sur le site de l'Atelier Théâtre Jean Vilar

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