Tout le poids de la routine
"Le petit lieutenant" de Xavier Beauvois,
avec Nathalie Baye et Jalil Lespert
Ayant découvert l'année dernière - sur le tard mais avec bonheur - le cinéma de Xavier Beauvois avec "Des hommes et des dieux" (un film dont il n'est, finalement, pas si facile de parler... mais je m'y risquerai peut-être un peu plus tard), je ne pouvais que sauter sur l'occasion qui m'était fournie de compléter ce premier contact avec "Le petit lieutenant", diffusé dimanche dernier sur France 2.
Abordant ce récit de l'enquête menée par une division de la police judiciaire parisienne suite à l'assassinat d'un sans-abri, j'en savais sans doute assez sur l'oeuvre de Xavier Beauvois pour ne pas m'attendre à me trouver plongée dans un polar classique. Mais je n'en ai pas moins été surprise par l'aspect presque documentaire de ce film qui montre, sans la plus petite trace de suspence ni de glamour, le quotidien d'un commissariat parisien dans toute ce qu'il a de plus monotone et routinier: un quotidien que l'enthousiasme un peu naïf d'Antoine, le petit lieutenant du titre, fraîchement émoulu de l'école de police, ne fait que rendre, par contraste, plus gris et plus terne. Alors oui, il y a bien une enquête et un scénario irréprochable, mais je retiendrai avant tout de ce "petit lieutenant" une atmosphère, un état d'esprit noir de chez noir. Et la lassitude, l'usure qu'un métier très dur impose à ceux qui l'exercent, et qu'on n'avait peut-être jamais filmé avec un tel dépouillement, une telle vérité qui ne s'embarrasse d'aucune fausse pudeur.