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Dans mon chapeau...
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9 avril 2009

Deux siècles de sidérurgie en bord de Meuse

"Les Hauts Fourneaux d’Ougrée – Histoire d’une usine à fonte" de François Pasquasy2871302650gf
4 étoiles

Céfal/Ly Myreur des Histors, 2008, 318 pages, isbn 978871302650

En cheminant de Huy vers Liège par la vallée de la Meuse, on ne peut pas ignorer le haut-fourneau B d’Ougrée. Construit en 1962, il est le dernier représentant d’une longue lignée qui s’est succédée au même endroit, depuis 1835 et l’implantation d’un premier haut-fourneau au coke par la société de la nouvelle fosse d’Ougrée désireuse d’assurer un débouché au charbon extrait sur ce site. C’est dire qu’en retraçant l’histoire de l’usine d’Ougrée, François Pasquasy nous fait revivre près de deux siècles d’histoire de la sidérurgie liégeoise, et le long cheminement, de fusions en regroupements, d’une petite société dont le capital était aux mains des familles Cockerill et Behr vers l’appartenance à un groupe multinational – Usinor, Arcelor et enfin Arcelor-Mittal -, s’arrêtant en 2008 en des temps plus sereins que ceux que nous connaissons aujourd’hui [1].

Mais si les aspects économiques, sociaux et politiques ne sont pas oubliés, l’auteur, ingénieur métallurgiste qui a mené l’essentiel de sa carrière dans la sidérurgie liégeoise et qui se consacre depuis son départ à la retraite à l’étude de l’histoire de cette industrie, a choisi de retracer avant tout les évolutions techniques dans le fonctionnement des hauts-fourneaux depuis le début du XIXème siècle et jusqu’à nos jours.

On suivra ainsi l’accroissement spectaculaire de la taille et de la productivité des hauts-fourneaux tout au long des deux siècles d’existence de l’usine d’Ougrée. Ou encore le remplacement progressif du "vent froid" (dans les premiers temps, l’air nécessaire à la combustion du coke était introduit dans le haut-fourneau à température ambiante) par un "vent chaud" à des températures de plus en plus élevées à mesure que les méthodes de préchauffage se faisaient plus performantes. Et l’on découvrira l’attention de plus en plus grande apportée au choix des minerais, en fonction notamment des opérations de production en aval du haut-fourneau – les minerais oolithiques de Marche-les-Dames, à une trentaine de kilomètres de Liège, sont ainsi largement utilisés au XIXème siècle mais délaissés pour un temps au profit de minerais espagnols moins phosphoreux et qui convenaient donc mieux en vue d’une transformation de la fonte en acier dans les convertisseurs Bessemer -, ainsi qu’à la préparation de la charge – l’agglomération des particules les plus fines favorisant une meilleure "descente" des matières dans le haut-fourneau.

L’ouvrage bénéficie d’une présentation très didactique : les termes techniques sont définis au fur et à mesure de leur apparition et repris dans un glossaire à la fin du volume, qui est en outre richement illustré de nombreuses photographies, de plans et de croquis, mais aussi de témoignages de tous ceux, patrons, ingénieurs ou ouvriers, qui ont veillé aux destinées des hauts-fourneaux ou qui en ont subi les caprices, tels les bouchages de creuset qui, dans la région de Liège, répondent au joli nom d’"emmacralage" [2]. Il en résulte un récit vivant, à la lecture agréable, et qui passionnera aussi bien les amateurs d’histoire des techniques que les spécialistes.

[1] Il y a quelques jours à peine, Arcelor-Mittal annonçait la mise à l’arrêt provisoire du haut-fourneau d’Ougrée suite à la crise économique de ces derniers mois. Pour en savoir plus: Article dans Le Soir

[2] Dans le Wallon de Liège, le terme "macrale" désigne en fait une sorcière. On pourrait donc traduire l’emmacralage par un "ensorcellement" du haut-fourneau.

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Commentaires
F
Oui, c'est aussi l'impression qui se dégage de ce livre, et c'est apparemment une caractéristique propre aux "hommes du chaud". <br /> <br /> Sur le site d'Ougrée, les hauts-fourneaux et le charbonnage ont d'ailleurs été étroitement liés, et ce pendant longtemps. A une époque, le puits d'entrée de la mine se trouvait même tout juste entre les planchers de coulée de deux des hauts-fourneaux...
D
Je ne connais pas Ougrée mais j'ai eu l'occasion après avoir soigné pour brûlure un ouvrier de haut fourneau, de visiter son usine, j'avais été impressionnée et j'avais senti chez les ouvriers un amour du métier et une grande solidarité un peu comme dans le monde de la mine
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